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Nous irons tous prier dans le même temple, en y conservant chacun ses opinions particulières. Ce ne serait donc là que l'unité de clocher, de murailles et de plancher, l'unité de hangar banal, comme on l'a dit, mais non l'unité d'esprit et de cœur, l'unité de foi. Jamais des hommes sérieux ne voudront se tromper euxmêmes au point de se tranquilliser dans la vaine apparence d'une telle mystification des consciences. Un docteur de l'Église, le grand saint Hilaire, a déclaré depuis bientôt quinze siècles ce qu'une âme droite doit penser de ces compromis extérieurs. Il parcourait les villes d'Italie pour réconcilier les ariens au catholicisme; interrompu tout à coup dans cet apostolat par un ordre de l'empereur Valentinien de retourner à son siége de Poitiers, il écrivit au peuple chrétien :

« C'est une belle chose que le mot de paix, et l'unité << est une belle pensée; mais qui doute que la seule « unité évangélique de l'Église, c'est la paix qui vient « du Christ... Nous vous avertissons, prenez garde à

necticut. A la tête du Congrès se trouvait un Comité de vingt-cinq membres, où siégeaient des congrégationalistes, des épiscopaux, des méthodistes, des baptistes et des unitaires; dans l'assemblée figuraient aussi des presbytériens, des universalistes, des quakers, etc. Nous ne croyons pas que les catholiques y aient été représentés..... Le Congrès de 1886 se tiendra à Saint-Louis (Missouri).

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Dans le rapport sur le principe essentiel du protestantisme, lu à l'assemblée de la Société pastorale suisse (9 août 1881), M. le professeur Nippold, avouant ses sympathies pour les vieux catholiques, s'exprimait ainsi : Peut-on imaginer pire intolérance, et plus diamétralement opposée au principe essentiel du protestantisme, que de leur dire: Si vous voulez être conséquents, ratia■ chez-vous à l'Église protestante! Et à laquelle des Églises protestantes, je vous prie? auquel de tous les symboles, hors desquels « il n'y a, dit-on, point de salut?» (Revue de théologie et de philosophie, 1881, p. 621.)

« la fausse paix de l'Antechrist. N'ayez point trop << d'amour pour les murailles de vos temples; ne « vénérez point comme Église de Dieu des toits, des «< édifices humains, et ne vous pressez point d'y placer l'apparence de la paix... Pour moi, les montagnes, « les lacs, les cachots et les gouffres me paraissent « souvent un asile plus sûr que les temples.

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Ranke, dans son Histoire de la papauté, dit : « La polémique violente des temps antérieurs a déserté sinon les écoles, du moins les relations habituelles de la vie. Toutes les inimitiés sont appelées à se réconcilier dans une unité supérieure. » Or, pour être supérieure, cette unité ne peut se faire que dans le catholicisme. Le chrétien catholique devrait apostasier, renier un grand nombre de ses croyances, s'il voulait embrasser le protestantisme; il descendrait donc, il abaisserait le niveau de sa foi. Le protestant, au contraire, n'a qu'à compléter le domaine de ses croyances pour embrasser le catholicisme: on ne lui demande pas plus d'apostasie, pour ainsi dire, que n'en subirait un honnête ouvrier élevé subitement au comble des richesses. Il ne doit pas redouter non plus l'idée d'un changement, puisque c'est une des maximes de sa religion qu'il faut progresser en matière de foi. Or, le plus réel et le plus magnifique progrès n'est-il pas de revenir à la source même de tout progrès moral?

Je termine ce sujet par une belle page de Mgr Rendu. L'illustre prélat, né dans le canton de Genève, avait fait une étude spéciale de la question qui nous occupe en ce moment. Il eut notamment une longue correspondance à ce sujet avec le père de l'historien génevois Amédée Roget. Dans sa Lettre au roi de Prusse il compare le protestantisme tout entier à un voya

geur qui est à la recherche d'une religion, et il lui montre ainsi le port1:

« La religion que nous offrons, pour remplir le vide qui rend tant de cœurs avides de la vérité, c'est la même qui a vivifié la terre pendant dix-huit siècles. Est-ce trop de la montrer comme la pierre précieuse de l'Évangile? C'est cette même religion qui a vaincu le paganisme, triomphé des hérésies, résisté aux dangers du pouvoir, dissipé les obscurs nuages de la philosophie, et traversé, en grandissant, tous les genres de persécutions. C'est celle qui a pris le monde à demi barbare, l'a porté dans ses bras comme une mère porte un enfant, l'a nourri, l'a élevé, lui a appris le langage des grandes choses, et l'a embelli d'une civilisation qui fait oublier celle de l'antiquité. C'est cette même religion qui a placé, le long des siècles, les flambeaux que la raison a le bonheur d'y rencontrer, en explorant les temps, et qui a donné au monde les seuls génies complets dont puisse s'enorgueillir l'humanité. C'est cette même religion qui inspire encore aujourd'hui le courage du martyre, et qui produit partout sous ses pas le plus grand de tous les miracles, celui du dévouement de l'homme à l'homme. Enfin, la religion que nous offrons à ceux qui en cherchent une est la seule qui puisse répondre à toutes les exigences de la raison, à tous les besoins du cœur; la seule encore qui parvienne à chasser le doute et la crainte du chevet de la mort. Quel bienfait, Sire, si Votre Majesté parvenait à la donner à tous ses sujets!...

« Il y a pour le catholique intelligent qui peut se

1 Lettre au roi de Prusse, p. 227.

demander et se rendre compte de sa foi, des moments d'indicible jouissance, des joies de conscience qui malheureusement ne peuvent lui être enviées parce qu'elles ne peuvent être connues que de lui. Représentons-nous le génie de Pascal ou celui de Bossuet citant à leur tribunal toutes les doctrines humaines qui ont successivement étonné et fatigué le monde. Quand on verra l'idolatrie, le fétichisme, le mahométisme couvrir encore d'épaisses ténèbres la moitié du genre humain ; quand la philosophie, qui a devancé, accompagné et suivi toutes ces religions de fabrique humaine, lui aura répondu qu'il lui a été impossible jusqu'à ce jour de former seulement deux disciples qui s'entendent, se comprennent et professent la même foi, qu'elle n'a pas même découvert le principe et le moyen de la vérité; quand les sciences, dépourvues de cette lumière qui pénètre l'intimité des choses, lui auront apparu comme de simples énumérations de faits privés de l'intelligence suprême, seule capable de les enchaîner à une cause et à une fin; quand il aura vu les nations paraître et disparaître de la face du monde, après avoir été soumises à des lois variables comme les caprices d'un esprit malade; quand, rentrant dans le christianisme, il aura compté et recompté les mille sectes du protestantisme, et qu'il les aura trouvées sans croyance arrêtée, cherchant, après trois siècles de discussion, un seul article de foi pour leur servir de point de ralliment; quand enfin il aura vu le doute, l'incertitude, le mécontement universel planer sur toutes les conceptions de l'esprit, sur les théories politiques, sur les principes des sciences, sur la morale et sur les lois; pressé par le besoin d'échapper au désespoir, il portera ses regards sur le catholicisme, seul resté debout au milieu

des ruines dont s'entoure la raison, et alors il répétera avec 250 millions de frères ce symbole qui, dans une admirable simplicité, renferme Dieu, l'homme, la nature, les mystères du temps et ceux de l'éternité.

«Oh! quand le bon chrétien verra sa religion forcément approuvée par cette fière raison obligée de s'avouer vaincue après des millions de combats; quand il reconnaîtra que ses doctrines, qui ont embrassé le monde dans toutes ses dimensions, sont encore pleines de vie, fécondes en œuvres et en vertus, qu'elles envoient des martyrs aux peuples barbares, des docteurs aux ignorants, des ouvriers civilisateurs aux sauvages, du dévouement partout; quand il aura reconnu qu'il n'est pas un vice qu'elles ne condamnent, pas une vertu qu'elles ne commandent, pas une perfection qu'elles ne conseillent, pas un penchant qu'elles ne dirigent, pas une souffrance qu'elles n'adoucissent, pas une institution utile qu'elles n'encouragent, pas un mystère dont elles ne donnent une raison suffisante; quand ces doctrines, après avoir traversé tous les âges du monde, lui auront apparu sauvegardées par un tribunal infaillible, soutenues, pratiquées par les savants les plus illustres, victorieuses des passions de dix-huit siècles, toujours entourées d'amour et resplendissantes de toutes les gloires de notre civilisation, il se trouvera subitement inondé de cette lumière pure dont l'esprit ne se rassasie jamais. Non, Sire, il n'y a point de langage pour exprimer ce que l'âme éprouve quand elle a le sentiment complet de son union avec la vérité. Comme si Dieu voulait, par le contraste, ajouter de la vivacité à son bonheur, il lui permet de voir du même coup d'œil le côté brillant et le côté nébuleux de la nue qui séparait les Hébreux de leurs ennemis. »

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