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âmes, dont une seule vaut plus que toute la création matérielle, Dieu ne leur donne toute leur parure que par la main du prêtre. Leur robe, leur beauté, leur aliment, les âmes ne les reçoivent que du ministère sacerdotal..... Dans l'ordre religieux, Dieu a presque tout remis aux mains du prêtre; c'est lui dont la main doit s'ouvrir pour que la bénédiction surnaturelle descende, et que, remplissant toute la capacité des âmes, elle déborde jusque sur la création extérieure et visible'. »

une

Sans le sacerdoce, il n'y a plus de participation possible à ce grand fleuve des grâces que Jésus-Christ a préparé à l'humanité dans les sept sacrements. Sans le sacerdoce réel, il n'y a plus de lien avec les apôtres; Église qui a perdu le sacerdoce ne peut plus être une branche de l'Église de Jésus-Christ. Tel est le malheur du protestantisme. C'est M. Dællinger qui tout récemment encore, même après ses autres défections doctrinales, rappelle aux protestants, ses amis, qu'ils ont abandonné la base essentielle du christianisme en abandonnant le sacerdoce :

« Je ne puis passer sous silence, dit-il, une difficulté spéciale qui s'oppose à la réconciliation de l'Église protestante d'Allemagne avec les anciennes Églises de la chrétienté. Je veux parler de l'interruption de la succession apostolique, causée par l'abolition de l'épiscopat et de l'ordination épiscopale des prêtres. Luther et ses collègues n'étaient contraints d'agir ainsi par aucune nécessité extérieure: car, dès l'origine, quelques évêques catholiques s'étaient rangés de leur côté; mais ils pensaient que, d'après le Nouveau Testament,

1 OEuvres du cardinal Pie, t. II, p. 19.

évêque et prêtre sont synonymes, et que l'épiscopat doit être considéré comme une institution humaine, introduite plus tard dans l'Église. Ce fut pour les protestants une perte plus grande que leurs docteurs ne l'imaginaient le lien qui les rattachait à l'antique Église catholique fut rompu. C'est ce qui apparut avec évidence dans leurs relations avec l'Église anglicane, qui sortait aussi de la Réformation, mais qui avait conservé l'épiscopat et, avec lui, la succession apostolique et l'ordination. En conséquence, tout ministre protestant allemand qui voulut passer au service de l'Église d'Angleterre dut recevoir, préalablement, l'ordination épiscopale, tandis qu'un prêtre latin ou grec est admis aussitôt, en vertu de son ordination précédente, dont la validité est parfaitement reconnue. Or, c'est de l'ordination épiscopale que dépendent la consécration de la Sainte Eucharistie et le pouvoir de donner l'absolution. Tout cela fut sacrifié à une interprétation douteuse de l'Écriture. Bon nombre de théologiens protestants admettaient en effet l'institution de l'épiscopat par les apôtres dans la dernière période de leur ministère, et tous sont obligés de reconnaître que, depuis la mort des apôtres, l'histoire de l'Église nous montre partout un épiscopat bien organisé, dont tout l'état de l'Église dépend'.

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Dællinger veut faire ici une exception en faveur de l'anglicanisme; mais elle n'est pas justifiée. Il est bien vrai qu'en Angleterre les protestants ont conservé le cadre hiérarchique de l'Église catholique; leur Église épiscopalienne, qui a passé aussi en Amérique, a des évêques, des prêtres et des diacres; mais ces dénomi

1 Doellinger, la Réunion des Églises (1880), p. 76.

nations ne suffisent pas pour fonder le sacerdoce. Le caractère sacerdotal ne se puise que dans l'ordination faite selon la forme sacramentelle instituée par JésusChrist et pratiquée par les apôtres. Or les épiscopaliens d'Angleterre n'ont pas gardé cette forme apostolique du sacrement; ils lui en ont substitué une autre de leur invention qui reçut, en 1559, l'assentiment du Parlement et du Roi. Dans un synode tenu à Londres en 1562, les évêques et les prêtres, voulant proclamer la validité de leurs ordinations, donnaient pour preuve qu'elles se faisaient selon « la formule du livre de consécration adopté depuis peu sous Édouard VI et confirmé par le Parlement ». « Faibles évêques, s'écrie ici Bossuet dans son Histoire des variations, malheureux clergé, qui aiment mieux prendre la forme de consécration dans le livre fait depuis peu que dans le livre des Sacrements de saint Grégoire, auteur de la conversion de leur pays, où ils pouvaient lire encore la forme selon laquelle leurs prédécesseurs et le saint moine Augustin avaient été consacrés! >>

Il est donc hors de doute que les ordinations anglicanes sont nulles. Le sacerdoce, quant à son caractère essentiel, est conservé dans l'Église d'Orient; il ne l'est dans aucune des sectes du protestantisme. Si, d'une part, nous plaignons ces peuples d'être privés des bienfaits du sacerdoce, comme on plaint une famille. dont le chef a dilapidé le patrimoine, il semble, d'autre part, que Dieu ait providentiellement voulu que la dignité du prêtre ne fût point avilie en subsistant au milieu de tant d'erreurs. L'hérésie n'a plus le pouvoir de forcer Jésus-Christ à habiter avec elle; en renonçant au sacrement de l'Ordre, elle a renoncé à posséder le Seigneur dans ses temples, et c'est une conséquence

heureuse pour l'honneur de Jésus-Christ; car le prêtre reçoit dans l'ordination un pouvoir ineffaçable : Jésus-Christ obéit toujours à sa parole pour descendre sur l'autel, quand même ce prêtre l'offenserait et le trahirait par ses infidélités. Il est donc préférable qu'il n'y ait plus de sacerdoce dans le protestantisme, afin qu'il n'y ait pas la profanation du corps du Sauveur Jésus aux contacts de l'hérésie.

Aussi quel soin l'Église ne met-elle pas à sanctifier ses prêtres? Lorsque, par la pernicieuse influence du pouvoir civil féodal, des abus se furent glissés dans le clergé, on vit les papes déployer toute leur sollicitude pour restaurer la discipline des mœurs.

Grégoire VII consacra tout son pontificat à cette lutte glorieuse; il eut le bonheur, en amenant l'empereur Henri IV à Canossa, de rendre à l'Église l'indépendance de son clergé et au clergé la sainteté de la vie ecclésiastique. Ce grand pape, dont le monde catholique célébrait naguère le huitième anniversaire séculaire, apparaît aux adversaires de l'Église comme une figure terrible, et on l'accuse d'avoir imposé au clergé un joug nouveau, tandis qu'il l'avait délivré du joug corrupteur du pouvoir civil. Grégoire VII en appelle au peuple lui-même pour le soutenir dans sa réforme, et s'il restait un mauvais prêtre, il interdit aux fidèles d'assister à ses offices, parce que, dit-il, « sa bénédiction se change en malédiction et sa prière en péché. » Dieu l'atteste par la bouche de son prophète, qui dit : « O prêtres, si vous ne voulez pas entendre et rendre « gloire à mon nom, dit le Dieu des armées, je << maudirai vos bénédictions, oui, je les maudirai. » (MALACH., II, 2).

Il s'agit surtout ici de la discipline du célibat. Une

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sorte de loi naturelle a établi chez tous les peuples anciens la conviction générale que l'exercice du sacerdoce exige la chasteté. Les prêtresses de Cérès à Athènes, les vestales à Rome, étaient tenues à la virginité, et ces dernières étaient enterrées vives si elles violaient leur vou. Les prêtres, chez les Juifs, n'étaient appelés que par intervalles, à servir à l'autel, et, pendant ce temps, la loi les obligeait à se séparer de leur famille pour demeurer au temple. La loi de l'Evangile pouvait-elle rester au-dessous de ces traditions de sainte délicatesse? Jésus-Christ, vierge, Marie sa mère, vierge, son précurseur même, Jean-Baptiste, vierge, tout respire la virginité dans les sources du sacerdoce nouveau. Jésus-Christ, le pontife suprême, veut à sa suite des prêtres vierges comme lui. Ses apôtres le comprennent ainsi saint Pierre, qui était marié, quitte son épouse. Sans qu'il soit besoin d'une loi positivement inscrite dans l'Évangile, le célibat devient dès les premiers jours la règle constante du clergé. Les seules prescriptions que nous trouvions dans l'Écriture Sainte à cet égard sont, non pour commander le célibat, qui était déjà de droit commun, mais pour régler l'admission aux saints. Ordres de ceux qui, ayant été mariés, devenaient veufs ou se séparaient volontairement de leurs femmes. Saint Paul (I Timoth., III, 2, 12) défend d'admettre ceux qui auraient été mariés plus d'une fois. A la fin du quatrième siècle, un mauvais prêtre de Barcelone, Vigilance, ayant voulu enfreindre la loi du célibat, tout le monde chrétien en fut scandalisé, et saint Jérôme écrivait à l'hérétique : « Que vont faire les Églises d'Orient? Que vont faire les Églises d'Égypte? Que vont faire celles du siège apostolique? Que vont-elles faire, elles qui n'admettent que des vierges, ou, parmi

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