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Replaçons-nous dans la lumière de l'Évangile. Là nous retrouverons l'homme coupable en présence de son Dieu offense; là nous entendrons les menaces terribles du Très-Haut contre le pécheur impénitent; là nous assistons d'avance à la scène du jugement dernier : le souverain juge, qui sera Jésus-Christ lui-même, a déjà arrêté les termes de la sentence qu'il prononcera : « Allez loin de moi, maudits, au feu éternel, qui a été préparé au diable et à ses anges» (MATTH., xxv, 41). Toute l'humanité, par la chute originelle et par les péchés actuels, est acheminée dans la voie de damnation, et tout le christianisme est institué pour l'en arracher. Jésus-Christ a donc voulu établir une grande magistrature spirituelle, investie de tous les pouvoirs qu'il possède lui-même, pour distribuer chaque jour aux âmes les grâces de la rédemption. Le sacrement de baptême efface le péché originel; un autre sacrement effacera le péché commis après le baptême. Ici le prêtre devra siéger comme à un tribunal; le coupable devra comparaître et s'accuser luimême, ouvrir sa conscience au juge, qui est en même temps père et médecin, afin que la sentence soit portée en toute connaissance de cause et pour le plus grand profit de l'âme. Jésus-Christ dit à Pierre : « Je te donnerai les clefs du royaume des cieux; tout ce que tu lieras sur la terre sera lié aussi dans les cieux; et tout

Société pastorale suisse, en déclarant expressément qu'elle conviait les divers partis dogmatiques, non pas à une embrassade universelle, mais à une confrontation réciproque. Cette suggestion a reçu un accueil si froid qu'elle n'a pas même été transformée en proposition ferme. La plupart des pasteurs bâlois estiment que, dans les circonstances actuelles, les manifestations de bienveillance inséparables d'une réunion de ce genre manqueraient de la sincérité désirable, et qu'elles seraient de nature à scandaliser les croyants. »

ce que tu délieras sur la terre sera délié aussi dans les cieux (MATTH., XVI, 19). Peut-on concevoir une délégation de pouvoir plus complète, plus absolue? JésusChrist adressa les mêmes paroles à tous les apôtres (MATTH., XVII, 16). Après sa résurrection il apparaît au milieu d'eux; «il leur montre ses mains et son côté » et il leur dit de nouveau :

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<< Paix à vous! Comme mon père m'a envoyé, moi aussi je vous envoie. Lorsqu'il eut dit ces mots, il souffla sur eux et leur dit Recevez le Saint-Esprit. Ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis; et ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus. >>

Dans ces paroles se trouve l'institution de la confession. En effet, le pouvoir de lier ou délier, de remettre ou retenir les péchés, ne peut s'exercer qu'à la condition de connaître les péchés à remettre ou à retenir : d'où l'obligation pour le pécheur d'ouvrir sa conscience aux prêtres chargés de remettre ou retenir ses péchés. Il n'était pas nécessaire que Jésus-Christ prononçât le mot de confession : elle était suffisamment indiquée par l'ensemble des paroles; aussi fut-elle immédiatement pratiquée par les apôtres et les premiers chrẻtiens. Saint Paul écrit aux Corinthiens (II aux Cor. v, 18): « Le tout vient de Dieu, qui nous a réconciliés à lui par le Christ, et nous a confié le ministère de la réconciliation. » Et les Actes des apôtres (XIX, 18) rapportent que les Éphésiens qui avaient embrassé la foi << venaient en grand nombre auprès de Paul, confesser et exposer ce qu'ils avaient fait », non pas leurs miracles, comme l'a dit Luther, mais leurs péchés, comme le porte la version syriaque et comme tout le contexte l'indique. Tous les monuments de la tradi

tion attestent l'institution divine de la confession et sa mise en pratique dès les origines du christianisme. L'historien Gibbon reconnaît que « la confession a été un des principaux points de la croyance papiste pendant les quatre premiers siècles ».

Le relâchement des mœurs obligea plus tard l'Église à fixer un temps qu'il ne serait pas permis de dépasser sans se confesser. Le quatrième Concile de Latran, en 1215, dut ordonner à tous les fidèles de se confesser au moins une fois l'an pour la communion pascale. C'est ce qui a fait dire aux ennemis de l'Église que la confession avait été inventée par le pape Innocent III. Mais une invention pareille n'est pas possible aux hommes. Dieu seul a assez de pouvoir pour imposer une obligation qui contrarie si péniblement la nature. Si la confession eût été inventée par Innocent III, ou par un autre pape, il se serait produit un mouvement universel d'opposition contre l'Église, et nous ne manquerions pas d'en trouver des traces dans l'histoire. D'où vient donc, au contraire, que l'histoire est muette à cet endroit, et que les accusations d'invention ne se produisent qu'au seizième siècle, c'est-à-dire trois cents ans après la date supposée de l'événement? D'où vient que toutes les Églises d'Orient séparées de l'Église romaine aux cinquième et sixième siècles, Arméniens, Jacobites, Cophtes, Nestoriens, etc., ont retenu la pratique de la confession secrète comme nécessaire? N'est-ce pas la preuve qu'avant leur séparatiou la confession auriculaire était déjà en usage dans le christianisme comme elle l'est aujourd'hui?

Le Concile de Trente a rétabli dans toute sa clarté la doctrine attaquée par les novateurs du seizième siècle; il y a consacré l'une de ses plus belles sessions,

la quatorzième. En face de cette exposition si complète et si concluante, je suis tenté d'effacer tout ce que j'ai écrit et de dire simplement à nos frères protestants : Prenez et lisez le Concile de Trente!

On n'aime pas chercher la vérité à ces grandes sources des Conciles. C'est un malheur. Nulle part elle ne parle avec autant de précisiou et d'autorité. On préfère des commentaires, surtout ceux qui font appel au sentiment. Pourquoi? Parce que l'homme est toujours porté à se prendre lui-même pour point de départ de la vérité et de la religion, à n'accepter que ce qui paraît concorder avec ses impressions et ses besoins. Faux et dangereux point de vue, je le répète. La religion nous est venue toute faite du Ciel; ce n'est pas à elle de cadrer avec nos habitudes et nos conceptions diverses; c'est à nous de régler sur elle notre esprit, notre cœur, notre volonté. Cette réserve faite, il ne nous est point interdit de jouir des miséricordieuses harmonies que Jésus-Christ a voulu établir entre ses préceptes et les besoins de notre âme, et je cite avec plaisir les pages suivantes d'un récent ouvrage sur la confession 1

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« Ce n'est pas un problème simple que celui du pardon. Il ne faut pas que ce pardon soit impossible, ni trop difficile; car où est l'homme qui peut se flatter de ne jamais violer la loi morale? Il ne doit pas non plus être trop aisé, parce que l'infirmité humaine abuserait de cette facilité, et regarderait moins à commettre des fautes si commodes à réparer. Voilà pour le passé; mais l'avenir aussi a ses exigences. D'abord le cou

1 Ex, osé de la doctrine catholique, par P. GIRODON, t. II, p. 184. Paris, Plon, 1884.

pable doit avoir quelque certitude que ses péchés lui sont remis. Qui ne sait que les consciences les plus pures sont aussi les plus délicates? que le repentir le plus sincère est aussi le plus inquiet? Peut-on laisser ces âmes, les meilleures, dans les tortures de l'incertitude et du remords, tandis que le criminel vivrait tranquille sur les ruines de sa conscience étouffée? Il est nécessaire, enfin, de prévenir le retour de chutes semblables, et, pour cela, il ne suffit pas de la volonté de les éviter; les fautes de malice sont rares parmi les hommes; quand nous tombons, c'est par faiblesse ou par ignorance, parce que nous n'avons pas vu la gravité d'un danger, parce que nous ne connaissons pas les moyens d'assurer notre fidélité, parce que la passion obscurcit le regard de notre esprit : il faut donc fortifier cette pauvre âme et l'éclairer, afin que ses misères elles-mêmes deviennent le moyen d'un progrès dans la vertu.

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<< Toutes ces conditions me paraissent indispensables; l'absence d'une seule rendrait le pardon incomplet ou défectueux. Lorsque Caïn eut, par son crime, amené la première mort humaine qui eût épouvanté la terre, voyant son péché connu de Dieu et sa conscience qui le lui reprochait : « Mon iniquité, dit-il, est trop grande pour que je puisse être pardonné » (Genèse, Iv, 13). Et tout le monde connaît les vers dans lesquels un poëte moderne a représenté les angoisses inextinguibles de cette conscience désespérée. A l'opposé, qui n'a entendu ce langage que l'Écriture met sur les lèvres des pécheurs : « J'ai péché, qu'en est-il « résulté de fâcheux pour moi? La miséricorde de Dieu << est grande, il aura pitié de la multitude de mes iniqui «tés. » (Eccl., v, 46.)

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