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n'y ait que des sectes dans le monde; et lorsqu'on dit : toutes les sectes chrétiennes, on ne sait ce qu'on dit, si l'on ne suppose pas un corps antérieur dont elles se sont détachées.

« Il n'est donc pas possible qu'il n'y ait que des sectes dans le monde ; et ce qui n'est pas moins rigoureusement démontré, c'est qu'il ne peut y avoir deux corps dont elles se sont détachées; car si, dans une religion divinement révélée (sur ce point tous les chrétiens sont d'accord), deux associations opposées se prétendent corps, l'une ou l'autre a nécessairement tort, puisqu'il ne saurait y avoir deux établissements primitifs et opposés l'une est donc corps, et l'autre

secte.

« Donc le corps, la religion, l'Église (c'est tout un) est d'un côté, et les sectes de l'autre, et il ne s'agit plus que de savoir où est le corps tout le reste sera

secte.

« Il n'y a pas de théorème mathématique plus clair et plus incontestable que ce qu'on vient de lire.

« Cette fable des sectes et de leur égalité a dû nécessairement en engendrer une autre non moins fatale que la précédente, c'est-à-dire celle des dogmes fondamentaux et non fondamentaux.1

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M. Naville reconnaît bien lui-même le fait historique de l'Église catholique; mais il n'attribue à ce fait qu'une origine fortuite, purement humaine; il lui refuse son origine divine. « Les imperfections humaines, dit-il, nécessitent seules l'institution du clergé... Les divisions et l'indifférence furent les premières causes qui forcèrent à séparer du troupeau des pasteurs

1 De Maistre, Lettres et opuscules inédits, t. II, p. 392.

chargés de le conduire'. » Mais si les imperfections humaines nécessitent l'institution du clergé, JésusChrist qui a fondé le christianisme pour les hommes, a dû précisément tenir compte des faiblesses de leur nature et pourvoir son institution de tous les organismes nécessités par la condition humaine. Le christianisme n'a pas été institué pour des anges, ni pour une « communauté toute composée d'hommes animés d'une foi sincère et d'une vive piété », dont M. Naville esquisse le tableau; il n'a pas été institué en partie double, d'une manière pour les parfaits et d'une autre pour les indifférents: il n'y a pour tous << qu'un Seigneur, une foi, un baptême » (Éphés., IV,5). Donc, si le prêtre est nécessaire à l'un, il l'est aussi à l'autre, et Jésus-Christ a rendu son ministère obligatoire pour tous, en prévision de cette nécessité à laquelle nul ne peut échapper au milieu des vicissitudes de la vie.

D'ailleurs, M. Naville émet un autre principe trèsjuste qui achève de démontrer l'institution divine du sacerdoce. Il dit (p. 90): « Une Église qui n'a pas en elle la vérité ne peut avoir en elle la grâce. » Or, assurément, Jésus-Christ a voulu donner la grâce à l'Église, et, puisqu'il ne pouvait lui donner la grâce sans lui garantir la vérité, il a dû instituer un moyen infaillible de maintenir la vérité toujours intègre. Quel peut être ce moyen, si ce n'est l'organe d'un sacerdoce enseignant avec pleine autorité et avec l'assistance de Dieu mème, tel que l'Église catholique le possède ?

Mgr Manning a publié en 1859 un petit volume intitulé: les Fondements de la foi. Partant de ce texte

1 Du sacerdoce dans l'Église chrétienne, p. 103.

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de l'Évangile (SAINT JEAN, XVII, 3): « La vie éternelle consiste à vous connaître, vous, le seul vrai Dieu, et Jésus-Christ que vous avez envoyé il établit que cette connaissance doit être parfaitement définie et certaine, pour être la connaissance qui donne la vie éternelle. Il n'y a pas de connaissance possible, si elle n'est définie et déterminée dans des limites certaines. Que signifierait, dans les sciences physiques, un problème d'optique, de mécanique, dont les données ne seraient pas définies? En histoire, ce qui n'est pas défini n'est que de la fable. En morale, une loi indéterminée ne peut avoir force obligatoire. A plus forte raison faut-il, pour la foi chrétienne, un objet nettement défini. La vérité, dans l'esprit de Dieu qui l'a révélée, était une, harmonique et distincte; c'est avéc ce même caractère de précision qu'elle a été révélée et qu'elle doit entrer dans l'esprit de l'homme. Ces prémisses posées, Mgr Manning en développe les conséquences1 :

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Quelle est donc la condition de la foi, si ce n'est pas la certitude ? Celui qui n'a pas une foi certaine n'a pas de foi du tout. On dit que le désir de certitude part d'une disposition malheureuse. Abraham, Moïse, Daniel, les apôtres et les évangélistes n'ont-ils pas souhaité la certitude dans la foi, et désiré de savoir, sans aucun doute, que Dieu leur parlait, et de connaître clairement et exactement ce que Dieu leur disait? Était-ce une disposition malheureuse? C'est plutôt la disposition contraire qui est digne de répulsion. Comment pouvons-nous nous contenter d'incertitude, dans des choses où sont engagés la vérité, l'honneur

1 Les Fondements de la foi, p. 20 et suiv. (Paris, Casterman.)

de Dieu et le salut de nos âmes? Cette conduite n'est vraiment pas irréprochable...

« A quelles extrémités sommes-nous donc descendus? On promulgue une vertu nouvelle qui consiste à être incertain de la vérité et de la volonté de Dieu, et à faire dépendre la foi de probabilités! Et cependant, quelle est la véritable idée d'une révélation, sinon une assurance divine de la vérité? Où commence la foi finit l'incertitude, parce que la foi s'appuie sur la véracité de Dieu; et ce que Dieu nous a dit et confirmé autorité divine ne peut être incertain.....

par son

« Je suppose que je fasse une inscription et que je vous la montre. Après que vous l'aurez lue, le sens s'identifiera, pour ainsi dire, avec la substance de votre esprit. L'inscription s'imprimera d'une manière indělébile dans votre mémoire. Divisez-la ensuite en vingt parties, distribuées à vingt personnes différentes, et dites à chacune de découvrir le reste. Je connais, moi, l'inscription pour l'avoir écrite, et vous pour l'avoir vue et lue. Mais eux n'en connaissent qu'une partie. Ils en ont un fragment, mais ils n'en peuvent soupçonner le sens. Ainsi en est-il des sectes qui environnent l'Église de Dieu. La seule inscription écrite non pas de la main de l'homme, mais par l'esprit de Dieu sur la raison illuminée de l'Église, est venue jusqu'à nous parfaite et entière. Mais chaque secte, en se séparant de l'unité, n'en a emporté qu'une parcelle.

« Les enfants du schisme n'héritent que d'un fragment. Et comme la foi vient par l'ouïe, par l'ouïe se communique la théologie, la doctrine de l'Église catholique dans son harmonie, son essence et sa précision. Ceux qui n'ont jamais entendu parler de cette foi, à laquelle ne mène pas la science la plus consommée,

n'ont qu'une portion de la vérité dont ils s'efforcent en vain de deviner le sens...

« A ceux qui nieraient que la théologie soit définie et certaine, je proposerai deux questions. Je leur demanderai d'abord : Que croyez-vous? Exprimez-le par des mots, concevez-le par la pensée, fixez-y le regard de votre intelligence: mettez-le par écrit dans une heure silencieuse, sachez au moins ce que c'est. Puisque vous estimez à haut prix votre âme immortelle, et croyez que la fin de votre être, c'est l'union éternelle avec Dieu, et que le moyen d'y arriver, c'est la connaissance de Dieu par Jésus-Christ, qu'il ne vous suffise pas de rester dans l'incertitude et l'indéfini touchant la vérité que vous savez être absolument nécessaire à votre salut...

« Je ferai une seconde question, je dirai: Je vous ai demandé ce que vous croyez; je vous demanderai maintenant pourquoi vous croyez; sur quel fondement de certitude vous rassurez-vous, et pourquoi? Vous me direz peut-être que vous y avez appliqué toutes les puissances de votre esprit? Il en est d'autres qui l'ont fait également et qui vous contredisent. Pourquoi seriezvous plus sûr qu'eux de ne point vous tromper? Vous n'avez pas reçu de message du Ciel, envoyé par privilége pour confirmer vos croyances, tandis que d'autres s'égarent. Sur quoi donc s'appuie votre certitude? Il faut plus que la persuasion de votre intelligence. Sans cela, tout le monde serait certain. De fausses monnaies circulent dans tous les pays; de faux miracles imitent les miracles véritables.

« La terre est pleine d'impostures. Je vous le demande encore, comment discernez-vous entre votre certitude et celle des autres hommes, de façon à savoir que leur

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