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Apôtres et des Pères, faisant de toutes les vérités comme une chaîne dont le premier anneau remonte aux livres saints, et dont il a le dernier dans la main; irrésistible, d'ailleurs, soit par la multitude, l'évidence et l'enchaînement des preuves, soit par sa modération envers les personnes, qu'il ne rabaisse pas, même quand il en triomphe, et dont les belles qualités ne laissent de le toucher. Je ne m'étonne pas que de grands ou d'excellents esprits, Turenne, Dangeau, lord Perth et autres, aient abjuré le protestantisme entre ses mains. Au temps de Bossuet, tout protestant qui ne l'eût été que pour être plus chrétien, assez instruit, d'ailleurs, et assez réfléchi pour supporter une si forte lecture, se serait rendu à ce grand homme. Mais le nombre étant petit de ceux qui raisonnent leur croyance, Bossuet eut inutilement raison, et l'inefficacité d'un si merveilleux travail est un illustre exemple à ajouter à tous ceux où il s'est plu à faire contraster la grandeur et la petitesse de l'homme.....

« Il faut chercher dans l'Histoire des variations comment l'intérêt se mêle aux opinions spéculatives et la passion aux vues de l'intelligence; comment les hommes de parti exploitent leurs doctrines ou en sont dupes; il y faut chercher leurs con radictions, nées de l'excès du sens propre; leurs repentirs, toujours trop tardifs; leurs efforts impuissants pour arrêter les conséquences des principes jetés à la foule; tout ce qu'engendre, en un mot, l'amour des nouveautés; à quelles marques on distingue les nouveautés durables de celles que suscite, pour un moment, l'impatience de certains esprits auxquels tout ce qui dure plus d'un jour est insupportable, et qui ne savent vivre que par enticipation.

« L'Histoire des variations est l'histoire de tou'es les sortes de sectes. On y voit tous les genres de caractères, toutes les nuances de l'esprit sectaire : les novateurs hardis, emportés, sans souci des conséquences, comme Luther; les modérateurs respectés, mais impuissants, comme Mélanchthon; les tiers partis, Bucer et ceux de Strasbourg; les exaltés, comme Zwingli, qui donnent leur vie pour leurs opinions; les tyrans, qui se font un règne sur les consciences opprimées, comme Calvin. Chacun y est peint sous ses traits caractéristiques'.

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Nisard s'étonne que Bossuet n'ait pas réussi, et il prête au protestantisme une certaine vertu sociale. qui supplée aux défectuosités doctrinales pour le tenir encore debout. Cette explication n'est pas fondée. Si les nations protestantes paraissent encore faire vivre leur religion nationale, c'est plutôt comme rouage politique que comme élément chrétien. L'hérésie s'est unifiée avec l'État; elle est devenue, selon le mot de Vinet, un « épiscopat civil ». C'est ce qui explique sa durée. Les rôles sont renversés : l'État porte la religion, tandis que ce devrait être la religion qui porte l'État. Mais cela n'est pas la vie.

Ajoutons que le protestantisme est une Église trèsfermée. La lumière du dehors y entre difficilement. Il y a quelques années j'étais à Londres. On me parlait des conversions fréquentes, beaucoup plus nombreuses que les chiffres publiés habituellement, parce qu'il faut souvent les tenir cachées, et l'on me raconta le fait suivant qui venait de se passer à l'archevêché :

1 D. NISARD, Histoire de la littérature française, t. III, p. 270

et s.

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LE PROTESTANTISME VU DE GENÈVE, EN 1886.

Un brave anglican, de Londres, alla trouver son pasteur pour lui soumettre quelques doutes survenus dans son esprit. Le révérend l'écouta, puis, d'un ton irrité, lui répondit : « Ah! je vois; vous avez lu des livres catholiques! C'est un juste châtiment, que vos doutes. << Portez-en la peine. Je ne vous donnerai aucune expli«cation. » Le pauvre homme insiste : « C'est vrai, je suis coupable; j'ai eu l'imprudence d'ouvrir un livre catholique. Mais enfin, monsieur le pasteur, ayez pitié de moi! Aidez-moi à sortir de mes cruelles perplexités. » Le révérend reprit de plus fort : « Non, vous ne méritez pas que l'on ait pitié de vous. Allez! Ça vous apprendra à ne pas faire de mauvaises lectures! »

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Cependant, le bon anglican n'y pouvait tenir. Il prit le parti d'aller s'adresser a Mgr Manning, dont il avait entendu vanter la science et l'affabilité. L'illustre archevêque écouta, déclara qu'il avait lui-même passé par de semblables doutes avant sa conversion, indiqua comment il s'en était tiré. L'anglican suivit le même chemin et devint à son tour un catholique convaincu. Combien il se ferait de retours à l'Église s'il y avait beaucoup de protestants qui commissent l'heureuse imprudence du converti de Londres, en mettant les yeux dans de bons ouvrages catholiques! Ne suffirait-il pas de connaître simplement l'origine de la Réforme pour être convaincu que la vraie Église ne peut être là, puisqu'il n'y a ni l'unité, ni la sainteté, ni la catholicité, ni l'apostolicité, aucune des quatre notes distinctives de l'Église de Jésus-Christ?

CHAPITRE XIV

Sincérité et écueils.

Libre examen devant la majesté de l'Église.
Discours d'Adolphe Monod: « Êtes-vous chrétien? ›

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- La

Mission de la femme, par le même. Indifférence pour la vérité, d'après M. Vinet. La neutralité est une injure à Dieu. Toutes les religions sont bonnes »; « Il ne faut pas changer de religion : Réponse d'un protestant. Conversion du ministre Esslinger, de Zurich, et ses motifs. Conversion de M. Stevenson, professeur à Genève; lettre à son frère. Crise douloureuse, mais nécessairement victorieuse. Conversion d'un pasteur suédois (1881) et sa lettre au consistoire. Résumé. Récentes conversions de MM. d'Orelli et Pestalozzi, à Zurich. Reproches entre libéraux et orthodoxes protestants, s'accusant mutuellement de pousser aux conversions. — L'examen des religions, à la balance de la raison et de l'histoire, conduit invinciblement au catholicisme. Discours de M. Théodore de la Rive sur les Essais de religions modernes. confesser sa foi. Au lecteur!

Obligation de

Arrivé au terme de cette revue du protestantisme, il me semble que des liens particuliers d'affection se sont formés d'avance dans mon cœur pour ceux qui me liront. C'est avec une joie confiante que je leur présente notre Église catholique, qui leur tend les bras. Elle se montre à eux sans fard et sans arrière-pensée, avec la simplicité de sa doctrine qui est toute faite de lumière et de chaleur. Il ne me reste qu'à dire : Voyez, contemplez, examinez. C'est ici l'heure du libre examen, et j'adopte l'invitation du professeur de Montauban, déjà nommé plus d'une fois dans ces pages:

« Il existe une société antique, objet de la vénéra

tion des siècles et de la confiance des peuples, se donnant au monde et étant acceptée par le monde comme le dépositaire officiel de la pensée divine, l'organe permanent de la révélation, la dispensatrice de la vérité, l'interprète de Dieu sur la terre. Les générations humaines sont venues, durant quelque deux mille ans, écouter cette voix imposante et obéir; les plus grands génies et les plus grands saints se sont courbés devant ces oracles inspirés. Eh bien! le libre examen, c'est pour chaque homme le droit de regarder en face cette autorité vénérable et redoutée, de lui demander ses titres, de les peser à la balance de la raison et de l'histoire '. »

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Ce tableau de la majesté de l'Église catholique n'est point exagéré. « Le droit de la regarder en face», non-seulement elle le reconnaît à tous, à ses propres enfants comme aux étrangers, mais encore elle les sollicite d'en user, elle facilite leurs recherches, elle les introduit dans tous les secrets de ses archives, elle met au grand jour ses titres glorieux, bien certaine que nul ne les trouvera légers, lorsqu'ils seront pesés « à la balance de la raison et de l'histoire » . Si le libre examen n'est que cela, non-seulement c'est un droit, mais c'est un devoir, devoir, hélas! trop méconnu parmi nos frères séparés. Combien en est-il qui aient jamais regardé l'Église en face?

Qu'ils se livrent donc à cet examen avec sincérité, en se souvenant des périls que leur signale encore M. le professeur de Montauban :

« Il faudrait avoir l'illusion de croire à l'infaillibilité des hommes et ne pas compter avec les bornes de la

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