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(47) Armes de vos combats, instrumens de vos arts.

Les insectes sont armés de pied en cap; ils attaquent, ils se défendent des dents en scie, des dards, des aiguillons, des pinces, des cuirasses, des ailes, des cornes, des ressorts prodigieux dans les pattes, des cordages ou filets, rien ne manque à l'appareil des organes nécessaires pour une guerre offensive et défensive. La nature n'a rien ménagé pour favoriser leur agilité; elle leur a prodigué tous les instrumens nécessaires à leur conservation, et il n'en est aucun qui ne tire parti de ses organes avec une adresse qui surprend le philosophe même. Voyez la note 49 ci-après.

(48) Que j'observe de près ces clairons, ces tambours. La nature a donné à plusieurs insectes, comme aux cigales, aux cousins, aux bourdons, aux grillons, aux sauterelles et à plusieurs scarabées, la faculté de former certains sons. Mais malgré toutes les recherches on n'a pas encore pu découvrir en eux les organes de l'ouie. L'usage de tous les organes des insectes n'est pas connu; peut-être que parmi ceux dont on ignore la destination il en est qui remplissent les fonctions de l'oreille. Il y a sans doute dans le chant de ces animaux des modulations, des différences, que nous ne saisissons pas; car il n'est pas dans l'ordre que le chant du combat, de la victoire, de la douleur et du plaisir, soit sur le même fon. Pourquoi les insectes n'auroient-ils pas, comme les autres animaux, des moyens d'exprimer leurs passions ?

(49) Enfin tous ces ressorts, organes merveilleux.

Il semble que chaque espèce d'insecte soit destinée à une profession particulière, et qu'elle en ait les outils; il y en a, pour ainsi dire, de tous les arts, de tous les métiers leurs premiers travaux sont toujours des chefsd'œuvres; leur industrie paroît aussi variée que la diversité des instrumens appropriés au travail qui leur est particulier. On voit parmi eux des architectes qui forment le plan d'un édifice capable de contenir plusieurs centaines d'habitans: les appartemens en sont si bien distribués qu'il n'est pas un coin de perdu; chaque individu y est logé séparément dans un espace suffisant. D'autres, plus solitaires, se construisent des cellules séparées, où règnent la propreté et la commodité. Les uns savent filer et ont des quenouilles : d'autres font de la toile, des filets, et ont pour cela une navette et des pelotons. Il y en a qui bâtissent en bois, et qui ont des serpes pour faire les abattis, des scies pour les débiter d'autres bâtissent en pierre; ils ont la truelle et les instrumens nécessaires pour les appareiller. Ceux qui travaillent en cire ont des cuillers, des ratissoires. Plusieurs, outre la langue pour goûter et lécher, ont la trompe, qui fait l'office de chalumeau, ou la tête munie d'une paire de tenailles, et ont encore à l'extrémité de la queue une tarrière mobile, propre

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percer et creuser, etc. Les mouvemens de ces petits animaux ne sont ni de caprice, ni fortuits; ils sont

pleins d'ordre et de dessein, et tendent tous au but

pour lequel la nature a formé chacun d'eux. Il en est plusieurs dont le gouvernement, l'économie, les mœurs et l'industrie pourroient servir d'exemple aux hommes: il semble qu'ils aient résolu le grand problème de la vie; ils ont trouvé l'art d'être heureux, ils le paroissent au moins. Pourroit-on en dire autant des hommes, qui se croient bien supérieurs?

(50) Et même après la mort y ressemble à la vie.

Voyez ce qu'a écrit l'abbé Manesse sur l'art d'empailler. (51) Que l'être et le néant réclamèrent tous deux.

Les jeux, les caprices ou les écarts de la nature ne sont pas indignes de l'attention d'un philosophe, quand on ne les observeroit que sous le rapport des avantages qui en peuvent résulter, abstraction faite de ce qu'ils présentent de curieux. On sait que par l'art, émané de l'observation, on est parvenu à changer la direction de la nature; qu'on a obtenu d'elle, dans les deux règnes des êtres vivans, des individus qu'elle auroit toujours refusés; que les mulets et les plus beaux fruits sont des monstres, qu'elle refuse de reproduire si l'art ne l'y force pas. Qui sait ce qu'on obtiendroit d'elle si tous ses écarts étoient bien connus? Quant aux restes des êtres gigantesques qui ont existé, leur examen, celui des lieux où on les retrouve, peuvent jeter un grand jour sur ce que fut la nature dans des temps antérieurs.

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NOTES DU TROISIÈME CHANT.

(52) Ronge indifféremment Dubartas.

Guillaume de Salluste du Bartas, auteur, inconnu aujourd'hui, de beaucoup de poësies, et d'un grand poëme sur la création, intitulé la Semaine. Il a été non-seulement poëte, mais négociateur et vaillant capitaine; et aucun de ces titres ne l'a sauvé de l'oubli.

Le passage suivant de la Semaine, dans lequel il dépeint le vol et le chant de l'alouette, lui paroissoit de l'harmonie imitative:

« La gentille alouette crie son tire lire,

« Tire lire a liré, et tire tiran lire

« Vers la voûte du ciel; puis son vol vers ce lieu

« Vire, et désire dire, adieu Dieu, adieu Dieu. »

DU QUATRIÈME CHANT.

(1) Oui, les riches aspects et des champs et de l'onde. ›

M. de la Harpe, long-temps après que ce morceau eut été lu à l'académie, a fait imprimer un poëme, plein d'intérêt, sur un sujet à peu près semblable. J'espère que, la lecture publique de mon ouvrage ayant précédé de plusieurs années la publication de celui de M. de la Harpe, on ne m'accusera pas de plagiat, pour quelques ressemblances qui se trouvent dans quelques passages de ces deux poëmes. (Note de l'auteur.)

(2) Fuit, roule et de son lit abrège les détours!

« Qua pinus ingens, albaque populus Umbram hospitalem consociare amant « Ramis, et obliquo laborat

« Lympha fugax trepidare rivo. »

HORAT. CARM. Lib. II, Od. III.

(Note de l'auteur.)

(3) Ses pas dans tous vos sens retentissent encor.

Le lecteur retrouvera peut-être ici avec plaisir, et sera charmé de comparer les différentes descriptions

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