« point emporter à son feu; il sait réprimer ses mou« vemens; non-seulement il fléchit sous la main de * « « celui qui le guide, mais il semble consulter ses désirs, et, obéissant toujours aux impressions qu'il <«< en reçoit, il se précipite, se modère ou s'arrête, et << n'agit que pour y satisfaire : c'est une créature qui << renonce à son être pour n'exister que par la volonté « d'un autre, qui sait même la prévenir; qui, par la promptitude et la précision de ses mouvemens, l'ex<< prime et l'exécute; qui sent autant qu'on le désire, «et ne rend qu'autant qu'on veut; qui, se livrant sans « réserve, ne se refuse à rien, sert de toutes ses forces, << s'excède, et même meurt pour mieux obéir. » « L'AGRICULTURE, PAR ROSSET; chant v. L'étalon que j'estime est jeune, vigoureux; « Il est superbe et doux, docile et valeureux. Son encolure est haute et sa tête hardie; « Ses flancs sont larges, pleins, sa croupe est arrondie: Il marche fièrement, il court d'un pas léger; Il insulte à la peur, il brave le danger. S'il entend la trompette, ou les cris de la guerre, Il s'agite, il bondit, son pied frappe la terre ; Son fier hennissement appelle les drapeaux; Dans ses yeux le feu brille, il sort de ses naseaux ; Son oreille se dresse et ses crins se hérissent; Sa bouche est écumante, et ses membres frémissent.... Au milieu de leurs jeux, et dès leur premier âge, " Des mœurs qu'ils montreront vous lirez le présage. Celui que vous verrez s'élancer dans les champs, "Courir, se balancer sur ses jarrets plians, " " Mépriser le vain bruit d'un torrent, d'une source, Défier ses pareils, les passer à la course, Dans le brillant essor de ses essais heureux « Porte déjà les traits d'un coursier généreux. « Ils vivent sans contrainte, et leur indépendance « Du frein qui les attend ignore la puissance....... Un coursier belliqueux, qui, formé pour la gloire, « Doit avec le guerrier voler à la victoire, " « Dès ses plus jeunes ans au bruit accoutumé, Sans crainte entend tonner le salpêtre allumé. Son œil audacieux parcourt l'éclat des armes; « Le son de la trompette est pour lui plein de charmes. " Il souffre les arçons, il' soutient en repos « Son maître qui s'élève et s'assied sur son dos. « A ses ordres docile, il s'arrête ou s'avance, « Il revient sur ses pás, il se dresse, il s'élance; Plus léger que les vents, par son vol dévancés, "Ses pas sur la poussière à peine sont tracés. << Il aime la louange, et son ardeur éclate " " " Au doux bruit de la main qui le frappe et le flatte. " C'est ainsi qu'un coursier utile aux champs de Mars Vous porte fièrement au milieu des hasards, Perce les escadrons, vole, se précipite; Le " carnage l'anime, et le péril l'irrite. Environné de morts, sanglant, percé de coups, Il semble s'oublier et ne penser qu'à vous. << Quand sa force le quitte, encor plein de courage, « « De l'horreur des combats il sort et vous dégage: Pour vous il semble craindre un coup qu'il a bravé; << Il expire content quand il vous a sauvé. » 《 Il y a dans ce morceau du poëme de l'agriculture, imprimé long-temps après la publication de la traduction des Géorgiques, plusieurs vers qui en sont visiblement empruntés. (Note de l'auteur.) (4) Le taureau qui gémit sur son frère expirant. (5) A qui doit demeurer l'empire des troupeaux. une On reconnoîtra facilement dans ce morceau imitation de la belle description que Virgile a faite du combat de deux taureaux pour une genisse, dans le 3.o livre des Géorgiques; description pleine d'ame et de mouvement, et l'une de celles où la poësie a prêté, avec le plus de succès, les passions de l'homme aux animaux. P. VIRGILII GEORGICON lib. III. « Sed non ulla magis vires industria firmat, « Quam Venerem et cæci stimulos avertere amoris, «Sive bovem, sive est cui gratior usus equorum; « Atque ideo tauros procul atque in sola relegant << Pascua, post montem oppositum, et trans flumina lata; « Aut intus clausos satura ad præsepia servant. « Carpit enim vires paulatim uritque videndo 《 Femina; nec nemorum patitur meminisse nec herbæ. «Dulcibus illa quidem illecebris, et sæpe superbos « Cornibus inter se subigit decernere amantes: « « « Pascitur in magna silva formosa juvenca: Illi alternantes multa vi prælia miscent Vulneribus crebris; lavit ater corpora sanguis, << Versaque in obnixos urgentur cornua vasto ་ " « Cum gemitu: reboant silvæque et magnus Olympus. Nec mos bellantes una stabulare: sed alter Victus abit, longeque ignotis exsulat oris, Multa gemens ignominiam plagasque superbi <«< Victoris, tum, quos amisit inultus, amores " Et stabula aspectans regnis excessit avitis. « Ergo omni cura vires exercet, et inter « Dura jacet pernox instrato saxa cubili, Frondibus hirsutis et carice pastus acuta; « « Et tentat sese, atque irasci in cornua discit « Ictibus, et sparsa ad pugnam proludit arena. ་ Ad terras, immane sonat per saxa, nec ipso Monte minor procumbit: at ima exæstuat unda <«<< Verticibus, nigramque alte subjectat arenam. 《 Et genus æquoreum, pecudes, pictæque volucres In furias ignemque ruunt: amor omnibus idem. << Tempore non alio catulorum oblita leæna « ་ Sævior erravit campis; nec funera vulgo Tam multa informes ursi stragemque dedere << Per silvas; tum sævus aper, tum pessima tigris: Heu! male tum Lybiæ solis erratur in agris. >>> 《 Traduction, par l'auteur. Crains aussi, crains l'amour, dont la douce langueur Des troupeaux, quels qu'ils soient, énerve la vigueur. « Que des fleuves profonds, qu'une haute montagne, Séparent le taureau de sa belle compagne; ་ Ou que, loin de ses yeux dans l'étable caché, K Près d'une ample pâture il demeure attaché : ༥ Près d'elle il fond d'amour; il erre, triste et sombre, Et néglige les eaux et la verdure et l'ombre. Souvent même, troublant l'empire des troupeaux, Une Hélène au combat entraîne des rivaux. « Tranquille, elle s'égare en un gras pâturage: « Ses superbes amans s'élancent, pleins de rage; « Tous deux, les yeux baissés, et les regards brûlans, «Entrechoquent leurs fronts, se déchirent les flancs; |