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Ici commence la seconde partie, que nous analyserons plus rapidement; car elle est pour nous moins intéressante que la première, quoique peut-être Cicéron y attachât plus d'importance. Elle n'est pas du reste d'un style moins admirable. Dans cette partie, Cicéron considère d'abord l'arrangement des mots (XLIXLIII); cet arrangement consiste ou à lier le plus habilement possible les dernières syllabes avec les suivantes, et à former les sons les plus agréables (XLIV-XLVII); ou à choisir les mots, et à les disposer si bien, que la mesure naisse d'elle-même (XLIX), ou à donner à la période une cadence harmonieuse (L-LI). L'ouvrage est terminé par une discussion sur l'origine (L11), la cause (LIII), la nature (LIV-LX), l'usage (LXI-LXVII), et enfin l'utilité du nombre oratoire (LXVIII-LXXI).

M. T. CICERONIS

AD M. BRUTUM

ORATOR.

1.

UTRUM difficilius aut majus esset negare tibi sæpius

idem roganti, an efficere id quod rogares, diu multumque, Brute, dubitavi. Nam et negare ei, quem unice diligerem, cuique me carissimum esse sentirem, præsertim et justa petenti, et præclara cupienti, durum admodum mihi videbatur; et suscipere tantam rem, quantam non modo facultate consequi difficile esset, sed etiam cogitatione complecti, vix arbitrabar esse ejus, qui vereretur reprehensionem doctorum atque pruden tium. Quid enim est majus, quam, quum tanta sit inter oratores bonos dissimilitudo, judicare, quæ sit optima species, et quasi figura dicendi? Quod, quoniam me sæpius rogas, aggrediar, non tam perficiundi spe, quam experiundi voluntate. Malo enim, quum studio tuo sim obsecutus, desiderari a te prudentiam meam, quam, si id non fecerim, benivolentiam.

Quæris igitur, idque jam sæpius, quod eloquentiæ genus probem maxime, et quale mihi videatur illud, cui

L'ORATEUR'

ADRESSÉ PAR CICERON

A BRUTUS.

I. ÉTAIT-IL plus difficile et plus grave de résister à vos

vœux réitérés que d'y satisfaire, c'est, mon cher Brutus, ce que je me suis demandé, et j'ai balancé long-temps. Répondre par un refus à la juste prière, aux nobles désirs de l'ami le plus cher et le plus fidèle, c'était bien pénible pour moi; mais s'engager dans une entreprise au dessus de ses forces, et peut-être même de ses idées, est-ce conforme, me disais-je, à ce respect avec lequel on doit attendre la critique des hommes éclairés? Qu'y a-t-il de plus grave, en effet, que d'avoir à décider parmi tant de grands orateurs de caractères si divers, quel est le meilleur genre, quelle est, pour ainsi dire, la meilleure forme d'éloquence? Mais vous m'en avez souvent prié; je vais l'essayer, moins dans l'espoir de réussir, que pour me soumettre à une épreuve. J'aime mieux manquer de prudence en vous obéissant, que de violer, en vous refusant, les devoirs de l'amitié.

Vous me demandez donc, et cela depuis long-temps, quel est le genre d'éloquence que j'approuve le plus,

nihil addi possit, quod ego summum et perfectissimum judicem. In quo vereor, ne, sí id, quod vis, effecero, eumque oratorem, quem quæris, expressero, tardem studia multorum, qui, desperatione debilitati, experiri nolint, quod se assequi posse diffidant. Sed par est omnes omnia experiri, qui res magnas et magno opere expetendas concupiverunt. Quod si quem aut natura sua, aut illa præstantis ingenii vis forte deficiet, aut minus instructus erit magnarum artium disciplinis: teneat tamen eum cursum, quem poterit. Prima enim sequentem, honestum est in secundis tertiisque consistere. Nam in poetis, non Homero soli locus est (ut de Græcis loquar), aut Archilocho, aut Sophocli, aut Pindaro; sed horum vel secundis, vel etiam infra secundos. Nec vero Aristotelem in philosophia deterruit a scribendo amplitudo Platonis ; nec ipse Aristoteles admirabili quadam scientia et copia, ceterorum studia restinxit.

II. Nec solum ab optimis studiis excellentes viri deterriti non sunt, sed ne opifices quidem se artibus suis removerunt, qui aut Ialysi, quem Rhodi vidimus, non potuerunt, aut Coæ Veneris pulchritudinem imitari. Nec simulacro Jovis Olympii, aut Doryphori statua deterriti, reliqui minus experti sunt, quid efficere, aut quo progredi possent: quorum tanta multitudo fuit, tanta in suo cujusque genere laus, ut, quum summa miraremur, inferiora tamen probaremus.

In oratoribus vero, græcis quidem, admirabile est, quantum inter omnes unus excellat. Attamen, quum

et que je crois le plus complet, le plus beau, le plus parfait. Je crains, si je cède à votre vœu, si je trace le portrait de cet orateur que vous cherchez, de rebuter les disciples de l'éloquence, qui, découragés à la vue d'un modèle désespérant, n'oseront plus marcher vers un but qu'ils croiront ne pouvoir atteindre. Cependant rien ne doit arrêter celui dont l'ambition aspire à de grandes choses qui veulent de grands efforts. Quand même on n'aurait pas ces dons de la nature, cette force de génie, ces hautes connaissances du parfait orateur, il faut suivre la route jusqu'où l'on peut. Quand on veut arriver à la première place, il est beau de s'arrêter à la seconde, même à la troisième. Homère, Archiloque, Sophocle ou Pindare 2 (je ne parle ici que des Grecs) n'ont pas seuls un rang parmi les poètes; il en est à côté d'eux, il en est au dessous d'eux. Aristote, dans la philosophie, n'a pas été effrayé de la majesté de Platon 3; la science merveilleuse et le vaste génie d'Aristote lui-même n'ont pas découragé d'autres esprits.

II. Ces grands hommes ne sont pas les seuls qu'une émulation courageuse ait soutenus dans leurs travaux : les artistes même renoncent-ils à leur profession, parce qu'ils ne peuvent atteindre à la beauté, soit de l'Ialyse que nous avons vu à Rhodes 4, soit de la Vénus de Cos 5? Le Jupiter olympien 6, le Doriphore" n'ont pas empêché d'autres statuaires d'essayer leurs forces, de donner carrière à leur génie. Il y en a tant qui se sont signalés chacun dans leur genre, que, malgré notre admiration pour les modèles, les ouvrages du second ordre obtiennent encore notre estime.

Si nous venons aux orateurs, je parle des orateurs grecs, il en est un dont la supériorité sur tous les au

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