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Effugere haud potis est, ingratis hæret) et angit',
Propterea, morbi quia causam non tenet æger:
Quam bene si videat, jam rebus quisque relictis
Naturam primum studeat cognoscerc rerum;
Temporis æterni quoniam, non unius horæ,
Ambigitur status, in quo sit mortalibus omnis
Ætas, post mortem quæ restat cumque manenda.
Lucret., De nat. rer., III, 1066–1091.
XLIX

Les songes

Et quo quisque fere studio devinctus adhæret, Aut quibus in rebus multum sumus ante morati, Atque in ea ratione fuit contenta magis mens; In somnis eadem plerumque videmur obire: Causidici causas agere, et componere leges; Induperatores pugnare, ac prælia obire; Nautæ contractum cum ventis degere bellum ; Nos agere hoc autem, et naturam quærere rerum Semper, et inventam patriis exponere chartis. Cetera sic studia atque artes plerumque videntur In somnis animos hominum frustrata tenere............ Usque adeo magni refert studium atque voluptas, Et quibus in rebus consuerint esse operati Non homines solum, sed vere animalia cuncta. Quippe videbis equos fortes, quum membra jacebunt In somnis, sudare tamen spirareque semper, Et quasi de palma summas contendere vires, Aut quasi carceribus patefactis sæpe quiete.

Venantumque canes, in molli sæpe quiete, Jactant crura tamen subito, vocesque repente Mittunt et crebras redducunt naribus auras, Ut vestigia si teneant inventa ferarum : Expergefactique secuntur inania sæpe

(1) Var: odit.

(2) Var. Voluntas.

Voilà comment l'homme se fuit; mais le fait est qu'il ne peut s'éviter; il se retrouve malgré lui, et il souffre, d'autant plus que c'est un malade qui ne saisit pas la cause de son mal. S'il y voyait clair, toute affaire cessante, il s'appliquerait à connaître la nature; car c'est sur l'éternité, non sur une heure, que porte la question, c'est sur l'état que nous réserve à nous mortels tout le temps qui après la mort doit s'écouler à jamais.

XLIX

(Tom. II, p. 485).

Les choses auxquelles notre pensée s'attache même après que nous les avons terminées, les occupations qui nous ont retenus longtemps et qui ont réclamé de nous le plus de contention d'esprit, sont aussi celles qui le plus souvent s'imposent à nous dans le sommeil. L'avocat plaide et explique les lois; le général fait la guerre et affronte les combats; le marin soutient la lutte que les vents engagent contre lui; à moi même chose arrive : j'explore la nature constamment et telle qu'elle est je l'expose dans la langue de nos pères. Chaque penchant, chaque art ne cesse d'occuper chacun de nous dans l'illusion de nos rèves. Tel est le pouvoir qu'exercent et l'attrait et le plaisir et l'habitude d'un travail particulier non seulement sur les hommes, mais sur tous les animaux en général.

Voyez le coursier généreux, pendant, qu'il est entièrement plongé dans le sommeil; il est en nage, il souffle de toutes ses narines, on dirait qu'il s'efforce de disputer la palme, que les barrières lui sont ouvertes, et pourtant il repose.

Le chien du chasseur bien souvent, au milieu d'un doux assoupissement, agite tout à coup ses membres, pousse des cris, et hume l'air à plusieurs reprises, comme pour garder la piste des bêtes: souvent même, réveillé par son rève, il se met à poursuivre le fantôme du cerf qu'il croit voir en fuite, jusqu'à ce qu'il revienne à lui désabusé.

Il n'est pas rare non plus que le jeune chien, de race

Cervorum simulacra, fugæ quasi dedita cernant;
Donec discussis redeant erroribus ad se.

At consueta domi catulorum blanda propago
Discutere, et corpus de terra corripere instant,
Proinde quasi ignotas facies atque ora tuantur.
Et quo quæque magis sunt aspera seminiorum,
Tam magis in somnis eadem sævire necessu'st '.
At variæ fugiunt volucres, pennisque repente
Sollicitant Divom, nocturno tempore, lucos,
Accipitres somno in leni si prælia pugnas
Edere sunt persectantes, visæque volantes.

Lucret., De nat. rer., IV, 959-970; 981-1004

L

Éloge d'Épicure.

Quis potis est dignum pollenti pectore carmen
Condere, pro rerum majestate hisque repertis ?
Quisve valet verbis tantum, qui fingere laudes
Pro meritis ejus possit, qui talia nobis

Pectore parta suo quæsitaque præmia liquit ?
Nemo, ut opinor, erit mortali corpore cretus :
Nam si, ut ipsa petit majestas cognita rerum,
Dicendum est : deus ille fuit, deus, inclyte Memmi,
Qui princeps vitæ rationem invenit eam, quæ
Nunc appellatur sapientia, quique per artem
Fluctibus e tantis vitam, tantisque tenebris,
In tam tranquillo et tam clara luce locavit.

Confer enim divina aliorum antiqua reperta :
Namque Ceres fertur fruges, Liberque liquoris
Vitigeni laticem mortalibus instituisse;
Quum tamen his posset sine rebus vita manere,
Ut fama est, aliquas etiam nunc vivere gentes;
At bene non poterat sine puro pectore vivi :
Quo magis hic merito deus esse videtur,

(1) Ces deux vers se rapportent à la théorie des simulacres et des émanations des corps exposée dans tout le développement philosophique dont fait partie cette peinture des songes.

caressante, qui vit d'ordinaire au logis, se secoue tout à coup, se relève vivement et se dresse comme si une forme et un visage inconnus étaient devant lui. Plus les éléments des simulacres sont rudes, plus leur action doit se faire sentir dans le sommeil.

Les oiseaux aux mille couleurs prennent subitement la fuite et de leurs ailes agitent en pleine nuit les bois divins, lorsque, mollement endormis, ils ont cru voir les vautours leur apporter la guerre, les batailles, et voler à leur poursuite.

L

(Tom. II, p. 466.)

Qui pourrait de son sein puissant faire jaillir un poème digne de la majesté d'un tel sujet et de la grandeur de ces découvertes? Quel est celui dont la grandeur aurait assez de force pour célébrer, selon ses mérites, le sage qui, grâce à ses recherches, aux conquêtes de son intelligence, nous a légué de tels biens? Nul, je pense, de tous les enfants des hommes: car s'il faut parler comme le demande la majesté du sujet, ce fut un dieu, oui, un dieu, illustre Memmius, celui qui le premier trouva cette science de la vie qu'on appelle de nos jours la sagesse, celui dont l'art tira notre vie de flots si orageux et de si épaisses ténèbres pour l'établir en un port si tranquille, au sein d'une lumière. si éclatante.

Compare, en effet, les divines inventions attribuées à d'autres dieux dans l'antiquité: Cérès, dit-on, révéla aux hommes les céréales, et Bacchus la boisson du jus de la vigne, choses qui ne sont pas indispensables à l'existence et sans lesquelles à ce qu'on rapporte, vivent plusieurs peuples maintenant encore. Mais on ne pouvait sans un cœur purifié vivre heureux, et c'est à bien plus juste titre que nous parait un dieu celui dont aujourd'hui même les instructions répandues chez les peuples de la terre char

Ex quo nunc etiam per magnas didita gentes
Dulcia permulcent animos solacia vitæ.

Herculis antistare autem si facta putabis,
Longius a vera multo ratione ferere :

Quid Nemeæus enim nobis nunc magnus hiatus
Ille leonis obesset, et horrens Arcadius sus?
Denique quid Creta taurus, Lernæaque pestis
Hydra venenatis posset vallata colubris?
Quidve tripectora tergemini vis Geryonai ?... 1
Cetera de genere hoc quæ sunt portenta perempta,
Seinon victa forent, quid tandem viva nocerent?
Nil, ut opinor; ita ad satiatem terra ferarum
Nunc etiam scatit, et trepido terrore repleta est
Per nemora ac montes magnos silvasque profundas;
Quæ loca vitandi plerumque est nostra potestas.
At nisi purgatum'st pectus, quæ proelia nobis,
Atque pericula tunc ingratis insinuandum?
Quantæ tum scindunt hominem cuppedinîs acres
Sollicitum curæ ? Quantique perinde timores?
Quidve superbia, spurcitia, ac petulantia ? quantas
Efficiunt clades? quid luxus desidiæque ?
Hæc igitur qui cuncta subegerit, ex animoque
Expulerit dictis, non armis, nonne decebit
Hunc hominem numero divom dignarier esse ?
Cum bene præsertim multa, ac divinitus ipsis
Immortalibu' de divis dare dicta suërit,
Atque omnem rerum naturam pandere dictis.

Lucret., De nat. rer., V, 1-28; 38-55.

LI

Tableau du mal physique dans la nature, preuve qu'il n'y a pas là une œuvre des dieux faite en vue de l'homme. Quod si jam rerum ignorem primordia quæ sint,

Hoc tamen ex ipsis cæli rationibus ausim

(1) Je passe ici neuf autres vers qui forment une série d'interrogations du même genre au sujet de tous les monstres vaincus par Hercule.

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